Art entre la raison, anti-raison et la déraison
Publié le 19/01/2019 à 03:55, Mis à jour le 19/01/2019 à 07:53
«L'art et la résilience»
Colloques et conférences
Dans la seconde conférence sur la résilience en art «Art entre la raison, anti-raison et la déraison» donnée dernièrement au musée de peinture, l'accent a été mis sur la nécessité d'équilibre entre la raison et le sentiment lors de la création d'une œuvre.
«Depuis des décennies, nous avons une vision de l'art et de l'artiste très erronée. L'artiste est perçu comme fantasque, d'un comportement aléatoire, incapable de s'ajuster à des exigences de certaines situations. Pourtant, une création demande une parfaite maîtrise, de l'organisation, de la rigueur et la connaissance dans le domaine exercé. Malheureusement, depuis trop longtemps, de nombreuses œuvres de la création contemporaine renforcent l'image de l'art farfelu ou du moins hermétique. Et quand la politique est d'apporter l'art au plus grand nombre, le pari est perdu d'avance. C'est pourquoi la résilience en art s'impose» a expliqué la conférencière.
Entre raison et passion
La résilience est la notion qui se réfère à une attitude très lucide face à des situations de stress et de blocage, que ce soit au niveau de l'individu ou de la société. La capacité d'analyser avec précision les cause, qu'elles soient internes ou externes, est la sortie de l'impasse s'appuyant sur la raison, la seule capable d'éviter le débordement de la passion.
Et l'artiste Ksenia Milicevic de conclure : «La résilience est la poursuite d'un chemin en bifurquant lorsqu'un événement le bloque, pour accéder à l'harmonie et l'équilibre. Cette attitude est valable pour l'art, comme pour toutes autres situations d'impasse. Ainsi, une œuvre d'art n'est que lorsqu'elle repose sur l'équilibre entre la raison et le sentiment».
La Dépêche du Midi
Art et Science
l'Art et la Science complémentaires ou opposés ? Les relations entre l'art et la science à travers l'histoire ont été tantôt très étroites, tantôt éloignées, pour se confondre aujourd'hui dans une sorte de symbiose floue.
Pour bien comprendre ce rapport fluctuant entre les deux il est nécessaire de préciser ce qui les rapproche et ce qui les distingue.
Avant tout il faut avoir à l'esprit que ce qui différencie l'intérêt pour une oeuvre d'art de tout autre intérêt : c'est qu'il renvoie à l'appréciation de l'oeuvre pour elle même. Elle n'a pas besoin d'aucun accessoire ni de discours. D'autre part, une fois réalisée l'oeuvre est vouée à son existence propre et à la durée. Lorsque la science est à la recherche de la connaissance du monde, l'art est une saisie du monde. Cette saisie est un acte intuitif. La science procède par une approche rationnelle. La science demande la cohérence de la pensée, établie des relations et les met en ordre. Elle cherche à dégager des lois et des conclusions concordantes qui ne dépendent pas des conventions arbitraires ou des intérêts individuels.
Mimesis, représentation, abstraction, anti-art
et réarticulation
Samedi 9 mars, Ksenia Milicevic donnera à 18 h 30 au musée sa dernière conférence de l'année sur la résilience en art intitulée «Mimesis, représentation, abstraction, installation et réarticulation». En Occident, depuis le Moyen Âge et tout au long de l'histoire, se produit une progressive désarticulation de l'art tel que le définissait Aristote : «L'art comme créateur d'une nouvelle réalité sensible qui, par mimesis et des règles de mise en œuvre, donne une lecture intelligible de la réalité face à l'apparent chaos de la réalité quotidienne. Pour Aristote l'art fait partie de «technè», de tout ce qui est élaboré par l'homme, que ce soit les arts mécaniques, dans lesquels il place la peinture, l'architecture, la sculpture… produisant des objets et les arts libéraux comme rhétorique, mathématique, musique, qui produisent des objets intellectuels».
Au Moyen Âge, l'art va prendre l'indépendance par rapport à d'autres productions mécaniques et se positionner comme une activité à part qui, par la représentation artistique, dévoile l'invisible par l'analogie, l'image et non plus une réalisation de la copie, une imitation. L'art va ensuite tendre vers de plus en plus d'autonomie. Au XXe siècle, il se détachera aussi de son fondement esthétique pour se positionner uniquement comme un produit de la volonté subjective de l'artiste. Un produit comme un autre perdant tous ses attributs de réalisation spécifique de l'homme, ouvragé et intellectuel à la fois. Avec l'avènement des nouvelles technologies, le beau, le sens et le savoir-faire sont définitivement évacués. «Avec la mondialisation et la forte influence occidentale dans le monde le résultat est identique partout. Face à cette situation nous avons la possibilité d'accepter ce fait comme une fatalité dû aux changements des temps et au progrès, malgré le terrible appauvrissement de la conscience de notre existence que ceci entraîne par la capacité d'amalgamer les individus dans une masse compacte, ou essayer de réarticuler tous ces éléments épars dans une résilience qui puisse redonner à l'individu à travers l'art la possession de sa pleine conscience et sa place dans le monde».